Budget 2025 : certaines avancées, mais aucun plan pour le secteur à but non lucratif qui assure la cohésion du pays
Plus d'un an et demi après le dépôt du dernier budget fédéral, le secteur à but non lucratif s’attendait à être inclus de manière significative dans le paysage social et économique du Canada. Le Budget 2025 reconnaît et investit dans l'importance de plusieurs programmes qui soutiennent la population, mais les mesures font fi des besoins systémiques plus larges du secteur qui les met en œuvre.
Le secteur accueille favorablement les investissements directs dans des programmes tels que le Programme national d’alimentation scolaire du Canada, Financement pour les femmes et l’égalité des genres et le soutien continu à Emplois d'été Canada, Stratégie emploi et compétences jeunesse, Fonds de la musique du Canada. Nous saluons également les investissements dans des programmes tels que la Prestation canadienne pour les personnes handicapées, Nouveaux Horizons pour les aînés, ainsi que l'introduction de la déclaration de revenus automatique pour les Canadiens et Canadiennes à faible revenu.
Toutefois, ces investissements ne représentent pas une stratégie coordonnée pour l'ensemble du secteur à but non lucratif. La conception du gouvernement d'un « filet de sécurité sociale solide » semble reposer sur le financement de programmes distincts. Cependant, ne pas investir dans les organismes, la main-d'œuvre et l'infrastructure qui les soutiennent passe à côté de l'essentiel : la solidité du filet de sécurité sociale du Canada dépend de la solidité des organismes à but non lucratif qui en assurent la prestation.
Le secteur à but non lucratif génère 226 milliards de dollars d'activité économique, ce qui représente 8,2 % du PIB du Canada. Le secteur emploie plus de 2,7 millions de personnes, soit davantage que les secteurs de la construction, de la fabrication ou du commerce de détail. Pourtant, le secteur à but non lucratif continue d'être contraint d'en faire plus avec moins. La hausse des coûts, le déclin des dons de bienfaisance, la pénurie croissante de bénévoles et la demande accrue de services poussent les organismes jusqu'à leurs limites. Sans investissement stable dans leur personnel et leur infrastructure, les organismes mêmes qui maintiennent le filet de sécurité sociale du pays risquent de devenir trop fragiles pour le soutenir.
Le Budget 2025 met à juste titre l'accent sur l'innovation, la productivité et la réduction de la lourdeur administrative, mais il n'étend pas ces priorités au secteur à but non lucratif. Investir dans l'innovation dans le secteur à but non lucratif permettrait aux organismes de tester et de déployer à plus grande échelle des modèles de prévention qui empêchent les gens d'atteindre un point de crise. Investir dans les données sur le secteur à but non lucratif, y compris en accordant un plus grand soutien permanent à Statistique Canada pour la collecte et l’analyse de données sur le secteur, permettrait d’allouer des ressources, de créer des politiques et de prendre des décisions sur le financement de manière plus judicieuse. Réduire le fardeau administratif du système fédéral de subventions et de contributions permettrait d’accroître l’impact des organismes sans même investir davantage de fonds publics. Il s’agit là de stratégies d'investissement plus intelligentes et plus efficaces que le gouvernement n'a pas encore adoptées.
Le budget ne comporte également aucun plan coordonné pour renforcer la main-d'œuvre du secteur à but non lucratif. Le secteur fait face à d’énormes pressions sur le marché du travail, avec un taux d'épuisement professionnel élevé, des écarts salariaux et une instabilité qui menacent la continuité des services. Le renouvellement de la main-d'œuvre doit faire partie intégrante de toute stratégie visant à maintenir le filet de sécurité sociale du Canada.
Les investissements ciblés dans les programmes sont les bienvenus, mais sans reconnaissance structurelle du secteur à but non lucratif en tant que partenaire économique et social clé, le Canada risque d'affaiblir les fondements mêmes sur lesquels reposent ces programmes.
Le secteur à but non lucratif continuera de collaborer avec le gouvernement fédéral afin de veiller à ce que les prochains budgets reflètent son rôle essentiel sur le plan social et de la croissance économique, pour bâtir un pays non seulement compétitif, mais également solidaire et résilient.